Les gendarmes à la Mauvoisinière.
En ce mois de mai 1895, les gendarmes de saint Florent le Vieil, Samson et Giroire viennent procéder à l’arrestation du garde particulier de la marquise de Gibot, Jean P... Ce dernier, âgé de 52 ans, né à Saint Rémy en Mauges, entré au service de la marquise en 1870, est accusé d’une tentative de viol sur la personne de Bernadette P..., âgée de 15 ans, originaire de la Chapelle-Saint-Florent, engagée comme vachère à la Mauvoisinière.
Pour se plaindre des agissements du garde, elle écrit une lettre à sa mère qui la transmet à la gendarmerie de Saint Florent.
Les langues se délient.
L’affaire est instruite par le juge d’instruction de Cholet et, au fur et à mesure que l’enquête progresse, d’autres révélations apparaissent qui mettent lourdement en cause le garde.
Tout d’abord, P... est accusé d’attouchements sur la personne de deux fillettes de onze ans, Anne G... du Plessis et Marie M... de la Tardivière. Celles-ci traversaient le parc de la Mauvoisinière pour se rendre à l’école et c’est là, entre septembre 1893 et janvier 1894 que le garde se livrait sur elles à des attentats à la pudeur, comme le dit l’enquête, « dans une cabane à 120 m. du château sous des arbres séculaires » ou dans le bois de Gibot. Le garde donnait aux petites des bonbons ou des gâteaux en leur recommandant, bien sûr, de n’en parler à personne.
C’est la tante d’une des petites, étonnée de voir sa nièce manger des friandises, qui lui a fait avouer que c’était P... qui les lui fournissait. Les pères des fillettes vont trouver le garde qui finit par reconnaître « quelques petites choses ». Les parents n’ont pas porté plainte à l’époque : le garde leur a assuré qu’il ne recommencerait pas
et les fermes que les parents exploitaient dépendaient de la Mauvoisinière.
D’autres femmes apportent leurs témoignages. Marie T... et Jeanne V..., vachères, ont quitté leur emploi à la Mauvoisinière, à cause du comportement du garde et elles l’ont signalé à la marquise. La portière du château, Jeanne V..., parle, elle, de propositions malhonnêtes. Mélanie T..., « gardant les moutons dans le champ du Grand Maragon », Jeanne V... et Marie B... près du Bois Noir, ont eu à se plaindre d’avances de la part de P...
La défense de l’accusé.
Sur les affaires les plus anciennes, le garde dit n’en avoir aucun souvenir. Sur le témoignage de la vachère Bernadette P..., il affirme : « Cette jeune fille n’est pas ordinaire, elle est menteuse ». Enfin, il crie au coup monté contre lui et il parle de vengeance à son encontre.
Le comportement de la marquise.
Dans un premier temps, elle ne veut pas croire aux turpitudes de son garde particulier. Elle répond à la mère de Bernadette P... : « cela ne devrait pas être vrai ! ». Elle ajoute que P... est à son service depuis 25 ans et qu’il est un serviteur fidèle.
Elle fait intervenir des témoins à décharge comme son frère William et sa cuisinière qui déclarent n’avoir jamais entendu parler de ces comportements malhonnêtes.
Enfin, elle veut surtout éviter le scandale : « il ne faut rien dire à personne ».
Le jugement.
Toutefois, devant tant de preuves et témoignages accumulés, Jean P... est jugé en Cour d’Assises, pour le délit d’attentats à la pudeur et il est condamné en août 1895 à 3 ans de prison. A sa sortie, il s’installe à Nantes.
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